« La peinture n’est pas une spéculation de l’esprit ou de l’intellect, elle est un geste qu’on porte en soi. »
Par cette citation, Jean Miotte nous donne les clés de lecture pour appréhender son œuvre. Au carrefour de l’Abstraction lyrique, de l’Art informel et du tachisme, l’oeuvre de Jean Miotte (1926-2016) est à la fois une peinture spontanée née d’un geste libre et une oeuvre de synthèse, celle de la peinture, de la musique et de la danse. Avec Jean Miotte, peinture et mouvement sont intimement liés. Proche du monde de la danse –les danseurs Zizi Jeanmaire et Wladimir Skouratoff étaient ses amis- et du spectacle, Jean Miotte a d’ailleurs réalisé plusieurs décors de théâtre.
C’est notamment dans le grand format que cette synthèse de la peinture et du mouvement s’opère parfaitement. Rompu à la technique de la fresque qu’il a exploitée, Jean Miotte s’est souvent frotté à la peinture de grand format. Il reçoit entre autres la commande d’une très grande peinture Sud à la demande de la ville de Paris pour orner le hall d’honneur de l’Opéra Bastille.
Le grand format sublime aussi la technique du all over par laquelle la peinture se prolonge au-delà des marges du tableau : on pense notamment à l’oeuvre de Sam Francis qui voulait peindre l’immensité du ciel ; les deux artistes se connaissaient d’ailleurs disposant un temps l’un et l’autre d’un atelier aux portes de Paris : Jean Miotte à Meudon, Sam Francis à Ville d’Avray.
Avec le grand format c’est aussi la peinture des grands espaces. Jean Miotte et Olivier Debré se rejoignent alors. On pense aux décors scéniques d’envergure d’Olivier Debré avec ses rideaux de scène de l’Opéra de Hong-Kong (1989) ou celui du nouvel Opéra de Shanghai (1999).
Avec Olivier Debré aussi, peinture, musique et danse sont liées et font même l’objet d’un ballet : Signes présenté à l’Opéra Bastille à Paris en 1997 et en 2013.
Dans cette très grande œuvre de 2001 de Jean Miotte la puissance de la couleur soutient le geste libre de l’artiste
qui balaie tel une danse la surface de la toile. Ces taches de couleurs qui s’entrechoquent semblent raisonner comme des notes de musique d’un orchestre symphonique. Les fonds blancs sont comme une respiration dans ce morceau musical. Le format imposant de la toile renforce la portée de son impact visuel et « sonore ».
Avec cette superbe peinture de 2001, c’est bien une synthèse de la peinture, de la musique et de la danse qui nous est ici proposée.
Texte : Astrid de Monteverde
© Astrid de Monteverde / Galerie Diane de Polignac