AUTOPORTRAIT, 1949
Signé et daté en haut à gauche
Huile sur toile
100 x 81 cm.
Collection particulière
Chers amis et collectionneurs,
Quelle meilleure introduction à notre exposition Bernard Buffet que cet échange au sujet de sa rétrospective magistrale, actuellement au Musée d’art moderne de la Ville de Paris…
J. G. : « Diane, je sors de l’exposition Buffet, merci de m’y avoir envoyé, il y a une force en effet.
Voici mes impressions pêle-mêle : souffrance, solitude, cri, tristesse, sombre, absurde, détaché, obsessionnel, obsédé, beau mec, noir, vide, laid, gris, fatigant, néant, jamais de sourire, mort, carcasse, Bacon ; il ne se passe rien, il n’arrive rien… primitif, un monde, une ville, vide… pourquoi toutes ces dents partout ? Il peint comme il écrit à la verticale, possédé.
Est-ce beau ? Je ne crois pas. Est-ce instructif ? Pas sûr mais peut-être
Dites-moi plutôt ce que vous, vous aimez dans cette peinture … ? »
Diane : « Buffet, c’est exactement ce que vous avez ressenti ; il peint sa vie, pêle-mêle, sans filtre. Fureur, souffrance, angoisse, solitude, isolement, pulsions morbides…
Une œuvre parfois répugnante, vulgaire, puis subitement admirablement poétique.
Jeune prodige encensé à 17 ans, le plus adoré et haï des peintres français de l’après guerre.
Le temps sera son seul juge.
À nous de choisir, de sentir ce qui est supportable ou pas, chacun selon ses recherches poétiques, son état émotionnel.
La vie est parfois déroutante et des oeuvres jusqu’alors hermétiques deviennent subitement limpides. »
Chers amis et collectionneurs, à vous de décider !
Lydia Harambourg
Historienne et critique d’art
Correspondant de l’Académie des Beaux-Arts
En 1948 le Prix de la Critique est décerné à Bernard Buffet. Inconnu de la scène artistique parisienne, il vient de recevoir la plus haute récompense remise à un peintre figuratif par un jury composé de personnalités du monde de l’art parmi lesquelles figurent Claude Roger-Marx, Jean Bouret, Jacques Lassaigne, René-Jean, Pierre Descargues.
Il partage ce prix avec Bernard Lorjou, son aîné de vingt ans. Buffet vient d’entrer avec fracas dans le monde de la peinture. Le public découvre un peintre accompli au métier immédiatement maîtrisé, servi par une écriture qui a valeur de style et qui l’identifie déjà au point qu’elle sera sa signature jusque dans ses extrémités les plus contradictoires. Comme le sont ces années d’après-guerre encore vécues dans la pénurie mais dans l’enthousiasme d’une joie de vivre retrouvée. Paris revit et offre un terreau sur lequel s’affrontent abstraits et figuratifs. 1948 scelle l’avènement du mouvement de la Jeune Peinture qu’incarne Buffet.
En mars, il manque de peu le Prix Drouant-David qui couronne depuis 1945 un jeune talent.
Membre du jury, le Docteur Giradin a remarqué sa toile, Le Buveur. Il devient son premier collectionneur (Legs au Musée d’art moderne de la Ville de Paris en 1953) et le présente à Emmanuel David qui propose au jeune peintre un contrat d’exclusivité dans sa galerie du Faubourg Saint-Honoré.
Trois mois plus tard, rive gauche, à la galerie Saint-Placide, le destin se précise en couronnant sa peinture au réalisme cru, d’un tragique déconcertant : Deux hommes dans une chambre.
Buffet est-il en train de prendre la tête du mouvement placé sous la bannière de l’incontournable présence de l’homme ? Avec Rebeyrolle, Thompson, Minaux, Guerrier, Pollet, Buffet pressent la portée universelle d’un art figuratif attaché aux valeurs humanistes avec le retour au sujet, au portrait dans un contact permanent avec la nature. Pour le jeune lauréat, la cause est entendue : « Le vrai sujet de l’art c’est l’homme dans son univers » et la figuration, l’unique « grande intuition » selon le critique Jean Bouret qui écrit en 1948 le « Manifeste de l’Homme Témoin » pour accompagner l’exposition éponyme dans laquelle il les réunit à nouveau en 1949. Buffet les rejoint. Le Salon des Jeunes Peintres, devenu le Salon de la Jeune Peinture en 1954 est la vitrine où s’affirme cette génération. Chaque année Buffet envoie une toile. Il fait partie du comité de 1950 à 1954.
Un peintre est né.
Buffet puise ses sujets dans un quotidien existentiel, une réalité humble, obscure, dérangeante comme peut l’être la souffrance morale et physique. L’écho des atrocités de la guerre résonne encore dans la mémoire douloureuse des hommes et des femmes. Ses figures faméliques affectent une dignité convenue. Les objets, familiers d’une vie frugale, sont réunis dans des vanités profanes. Avec le thème du crâne, il souligne son lien avec le memori morti qui traverse l’histoire de la peinture (et la sienne) qu’il connaît admirablement à laquelle il fait des renvois
récurrents comme La Raie avec Chardin.
Dans cette époque de privations, l’ascèse de l’expression graphique est une réponse à l’anémie des âmes. Peintre de la ligne et des aplats, il créé une écriture qui ne s’oublie pas. À travers une forme réduite à sa stricte géométrie et une tonalité irréductibles aux servitudes véristes, sa grandeur plastique s’impose. La précision drastique du dessin dissèque jusqu’à la trame son sujet. Le trait vibrant installe la certitude d’une vision réduite à son illusionnisme précaire comme le montrent ses paysages. Pendant ces années Buffet peint en reclus.
En 1950 il quitte la capitale et s’exile avec Pierre Bergé dans le Vaucluse à Séguret, calé sur un des contreforts du Ventoux, avant de vivre dans une ancienne bergerie à Nanse, dans la région de Manosque près de leur ami Jean
Giono qui publie en 1956 une monographie.
Avec la peinture, unique interlocuteur, le combat qu’il a choisi s’accomplit dans le travail journalier et l’exigence pour conquérir sa propre liberté de créateur. La pertinence de sa résolution lui confère une place de pionnier. Son art intense et émotionnel est garant de son éloquence picturale et de son audace. L’abstraction, il aurait pu s’y engouffrer sans son attachement viscéral à la vie et à la réalité. Il donne sa réponse dans un entretien paru dans la revue « Arts » en date du 19 février 1958 : « je suis violemment contre (…) elle méprise la forme ».
Son élocution graphique est proportionnelle à son refus de bavardage. Sur la surface réduite à deux dimensions pour une latéralité qui asservit l’image à sa propre écriture, la force narrative réside dans le trait qui cerne la forme jusqu’à l’efflanquer. Le travail des gris et des verts, des blancs pour les fonds, comme des couleurs fanées appliquées en fines couches superposées et transparentes se complète de camaïeux ternes et délavés réveillés d’une couleur vive et acide, et d’imperceptibles entailles, blessures sur la peau de la peinture.
La couleur reprendra sa place progressivement. Un maniérisme réside dans le culte de la ligne qui narre, décrit et exprime dans sa rigueur, sa révolte, sa douleur et sa beauté extatique.
En 1955 une enquête menée par la revue « Connaissance des Arts » le désigne meilleur peintre de sa génération. Ce qui n’éradique pas ses rapports conflictuels inaugurés avec la critique. À la Biennale de Venise de 1956 une salle lui est réservée au Pavillon Français.
En 1948, Maurice Garnier, installé rue de Seine à la galerie Visconti devient son marchand, avec la galerie Drouant- David, puis en collaboration avec Emmanuel David depuis 1956 dans leur galerie commune, 6 avenue Matignon, jusqu’en 1968, année où Maurice Garnier assume seul la direction de la galerie désormais sous son nom. Une longue collaboration perpétuée par le rendez-vous annuel
au mois de février avec une exposition thématique depuis 1952, va unir le peintre et le marchand pendant soixante ans. Une aventure sans précédent dans l’histoire de l’art.
En 1958 la galerie Charpentier organise sa première rétrospective « Cent tableaux de 1944 à 1958 ». 100 000 entrées payantes. Buffet a trente ans.
Après sa rupture avec Pierre Bergé, Bernard Buffet épouse le 12 décembre 1958 Annabel Schwob de Lure.
Dans le succès et l’isolement, dans le rejet et l’incompréhension, le soutien indéfectible de fidèles collectionneurs, Buffet réalise une peinture que Pierre Descargues dès 1948 qualifie de « poésie de la souffrance exaltante ».
Dès cette décennie, Bernard Buffet a trouvé la mesure de son destin.
Corinne Barbant
Responsable de la Bibliothèque Dominique Bozo, LaM Lille Métropole musée d’art moderne, d’art contemporain et d’art brut
Lorsque Roger Dutilleul (1872-1956) rencontre l’oeuvre de Bernard Buffet à la fin des années 1940, il a derrière lui toute une vie de collectionneur marquée tout particulièrement par son goût pour Amedeo Modigliani et le cubisme, Pablo Picasso, Georges Braque et Fernand Léger notamment. Collectionneur depuis 19041, il a toujours su suivre son goût et ses inclinations avec une grande indépendance, amassant dans son appartement parisien des oeuvres d’artistes aussi divers que Joan Miró, Henri Laurens, Eugène Kermadec, André Lanskoy ou les peintres naïfs André Bauchant et Camille Bombois.
Il se passionne avant tout pour des artistes et non des mouvements. Il est ainsi très partagé sur le cubisme en tant qu’école comme l’indiquent plusieurs notes relevées dans les livres de sa bibliothèque2 qui permettent de mieux comprendre sa personnalité et ses goûts.3 Dans L’art vivant d’André Salmon, après avoir commenté l’affirmation « [Picasso] chef véritable de l’école » d’un « si école il y a ! », il souligne ainsi le passage suivant : « Il est bien permis de goûter modérément les joies que le cubisme prétend procurer à l’amateur. On peut s’intéresser aux recherches intelligentes, aux investigations géométriques et plastiques d’un ou deux artistes responsables du cubisme, sans tirer son chapeau devant toutes les productions de tous ces messieurs de l’école. »4 Cet attachement à des peintres plutôt qu’à des courants se confirme à la fin de sa vie par son enthousiasme pour la peinture de Bernard Buffet.
Cet enthousiasme est très sensible dans sa lecture de l’ouvrage de Pierre Descargues, Bernard Buffet5, contre lequel il réagit parfois vivement. Il met ainsi deux points d’interrogation en face de ce passage qu’il souligne : « Il fallait une peinture aussi violente, aussi gênante que celle de Bernard Buffet pour que le renversement des intérêts se fit avec cette petite odeur de scandale. » Plus loin il écrit « au contraire très plastique » en face de cette phrase : « l’on comprendra peut-être alors le pourquoi de l’inutilité des couleurs chatoyantes et de tout effet plastique en général ».
Dans l’oeuvre de Bernard Buffet, Roger Dutilleul semble retrouver les qualités plastiques qu’il appréciait dans le cubisme, le souci du volume, la poésie et la nature non plus imitée mais imaginée. La transposition de la réalité dans la peinture, dans une sorte de vérité transfigurée, constitue en effet un des ressorts importants du collectionneur. C’est peut-être pour cette raison que la moitié des oeuvres relevées par Francis Berthier dans les carnets de Dutilleul et mentionnées dans l’inventaire de sa collection sont des natures mortes : Moulin à café, Oignon, Boîte à sel, Le fait-tout. Elles font écho à d’autres oeuvres de sa collection comme Nature morte (coffret, tasse et pomme) et Instruments de musique et tête de mort de Pablo Picasso.
De même, la présence très forte des tons gris et bruns dans les premières oeuvres de Bernard Buffet a très certainement attiré Roger Dutilleul qui porte une grande attention aux gris, notamment chez Cézanne, Picasso ou Léger6, et aux bruns, tout particulièrement dans l’oeuvre de Modigliani7. La profondeur et la variété des nuances de ces couleurs dans les tableaux de Bernard Buffet tendent parfois vers un monochrome gris et rencontrent les goûts du collectionneur qui aime analyser les rapports de tons, les valeurs et les demi-teintes. Le trait extrêmement graphique de Bernard Buffet semble en revanche plus éloigné de ses inclinations habituelles, bien qu’il soit à un moindre degré bien présent dans le cubisme.
Dans la liste relevée par Francis Berthier8, une Tête de femme et une Nativité illustrent quant à elles l’importance de la figure dans la collection de Roger Dutilleul. « La figure et le portrait occupent une place très importante dans l’ensemble de la collection de Dutilleul, et son goût en terme de peinture ancienne se porte souvent vers les portraitistes. »9 L’allongement et la déformation des corps chez Bernard Buffet sont également présents chez deux peintres particulièrement chers à Roger Dutilleul, le Greco et Modigliani. Cette caractéristique se retrouve chez Grünewald. La présence dans la bibliothèque de Roger Dutilleul de plusieurs livres sur le peintre du retable d’Issenheim atteste aussi qu’il est touché par des peintures sur la condition humaine.
L’attachement à l’oeuvre de Bernard Buffet peut certainement être lié au tragique de la destinée humaine d’autant plus sensible chez un homme alors âgé et ayant traversé les deux guerres mondiales.
À travers les remarques dont il parsème les livres de sa bibliothèque transparaissent en effet de manière très affirmée son attachement à certains artistes de différentes époques, ses rejets aussi. Parmi les peintres anciens, le Greco, Vermeer ou Chardin semblent le retenir tout particulièrement, puis au XIXe siècle Goya, Delacroix, Ingres, Van Gogh, Renoir, Seurat et surtout Daumier et Corot. Son intérêt pour l’art naïf est très sensible à la fois dans le nombre de livres de sa bibliothèque qui lui sont consacrés et les nombreux passages soulignés sur le Douanier Rousseau, Bauchant, Vivin ou Utrillo. Cézanne, Picasso et Modigliani sont les trois peintres qu’il commente le plus souvent et qui règnent sans conteste à son panthéon personnel. En revanche, Gauguin, Juan Gris ou Henri Matisse ne correspondent pas à ses goûts. Bernard Buffet est quant à lui le dernier coup de foudre du collectionneur.
Il est moins présent dans sa bibliothèque du fait de sa jeune carrière et du peu d’ouvrages disponibles au moment des acquisitions, mais en lecteur averti Roger Dutilleul a acquis toute la documentation disponible. Il a également transmis son intérêt et son enthousiasme pour la peinture de Bernard Buffet à son neveu Jean Masurel qui a complété le fonds de la bibliothèque de son oncle en poursuivant les acquisitions d’ouvrages sur l’artiste et en enrichissant sa collection de tableaux souvent monumentaux tels que Le grand nu blanc (1948), Lapidation (1948), Nu couché (1949), Nature morte au melon (1949) ou encore Femmes à leur toilette (1953) donnés en 1979 dans sa donation à l’origine du LaM, Lille Métropole musée d’art moderne, d’art contemporain et d’art brut. Bernard Buffet réalise en 1954, deux ans avant la mort de Roger Dutilleul, le Portrait de Jean Masurel10, comme Modigliani avait réalisé celui de Roger Dutilleul en 1919, illustrant ainsi les liens privilégiés entre l’artiste et son collectionneur mais aussi entre le neveu Jean Masurel et l’oncle Roger Dutilleul qui a su lui transmettre sa passion de l’art.
1 Cf Francis Berthier, Recherches sur la collection de Roger </em Dutilleul, thèse de 3e cycle, histoire de l’art et archéologie, Université Paris I, 1977.
2 Une grande partie de la bibliothèque de Roger Dutilleul a été donnée en 1979 par son neveu Jean Masurel au LaM Lille Métropole musée d’art moderne, d’art contemporain et d’art brut où elle est conservée.
3 Cet article reprend en partie mon texte « Pour l’amour de la peinture moderne, portrait de Roger Dutilleul en lecteur », in Picasso, Léger, Masson, Daniel-Henry Kahnweiler et ses peintres, Villeneuve d’Ascq, LaM, 2013 pour lequel avait été réalisé un inventaire des annotations de Roger Dutilleul dans les livres de sa bibliothèque.
4 André Salmon, L’art vivant, Paris, G. Crès, 1920, p. 121 et 159.
5 Paris, PLF, 1949
6 Dans le livre de René X. Prinet, Initiation à la peinture, Paris, Librairie d’art R. Ducher, 1935, il souligne ainsi tous les passages sur le gris : p. 13-14, 36, 69, 76-77, 113.
7 Dans le catalogue de la vente Tableaux modernes, aquarelles et dessins, collection de M. Léon Z…, Paris, Hôtel Drouot, 9 juin 1920, il précise à côté des tableaux reproduits en noir et blanc les nuances de brun par des termes précis comme chocolat-beige, châtain ou encore acajou sombre.
8 Op. cit.
9 Marie-Amélie Senot, « Roger Dutilleul, le ‘choc’ du collectionneur», in Amedeo Modigliani, l’oeil intérieur, Paris, Gallimard, Villeneuve d’Ascq, LaM, 2016, p. 126
10 Entré par don dans les collections du LaM en 2013
Dominique Gagneux
Conser vatrice en chef du Patrimoine
Roger Dutilleul et Maurice Girardin à Paris, Charles Im Obersteg à Bâle1: ces trois collectionneurs d’une même génération ont rassemblé dès le début du XXe siècle des collections aux profils similaires. Par leur action et leur vision engagée, ces premiers amateurs du fauvisme et du cubisme ont joué un rôle essentiel dans le développement de l’art d’avant-garde, suivant leur engouement pour des artistes dont ils achetèrent les oeuvres avec rigueur et méthode. Ainsi, Maurice Girardin collectionna Vlaminck, Rouault et Matisse, Braque et Picasso, Van Dongen, Dufy et Fernand Léger. Im Obersteg s’attacha à acquérir des peintures de Chagall, Picasso, Soutine, Rouault et, en raison d’une proximité culturelle, s’intéressa à Alexej von Jawlensky, Paul Klee, Emil Nolde et Wassily Kandinsky. Dutilleul aussi aima Picasso, Braque, Derain, Soutine et Léger, et surtout se passionna pour Modigliani, avant de devenir le principal mécène d’André Lanskoy2.
Les photographies de leurs intérieurs sont toutes étonnamment proches : l’accumulation de peintures du sol au plafond témoigne d’un grand éclectisme et d’une vision très personnelle, mêlant chefs-d’oeuvres de l’art moderne, objets d’arts premiers ou peintures naïves avec d’authentiques coups de coeur. Aucun de ces ensembles ne révèle d’orientation préétablie mais ils résultent d’une proximité avec les artistes et de choix assumés qui les entraînent parfois dans les marges (Maria Blanchard et Marcel Gromaire pour Girardin). Ils expriment aussi une inclination pour les expressions sensibles, une vision mélancolique du monde qui les a conduits à s’attacher aux oeuvres de Soutine, de Rouault ou de Modigliani.
Rien d’étonnant donc à ce qu’à partir de 1947 tous trois aient été séduits par l’esthétique neuve portée par Bernard Buffet en qui ils virent un artiste important, susceptible d’apporter à la peinture un renouveau humaniste et sensible, si nécessaire dans le contexte de l’après-guerre. Les oeuvres empreintes de solitude et de mysticisme déjà présentes dans leurs collections, les avaient préparés à entrevoir ce que l’oeuvre de Bernard Buffet avait de singulier dans ses affirmations et à apprécier son audacieuse confrontation avec la grande peinture, l’austérité de ses natures mortes et la sensibilité prégnante de ses Pietas.
La précocité et l’unicité du style de Bernard Buffet peuvent dérouter l’historien, le critique ou l’amateur d’art, familiers des filiations comme des rapprochements conceptuels et formels entre les oeuvres. Il n’a que dix-neuf ans lorsqu’il invente pratiquement ex nihilo une peinture aux caractères très marqués : refus de la séduction de la couleur au profit d’un graphisme noir hérissé, absence totale d’ombres, fonds griffés ou striés de coups de pinceau apparents, dominantes de gris et d’ocre, surface plane sur laquelle se promène le regard du spectateur qui ne peut pénétrer davantage, pas plus d’ailleurs qu’il ne peut établir de communication avec les figures longues et émaciées.
Mais d’où vient ce particularisme de la peinture de Bernard Buffet ? Assurément de sa longue fréquentation des musées – il était doté d’une prodigieuse mémoire visuelle –, de ses lectures et de ses visites dans les salons artistiques qui se tenaient régulièrement à Paris. On peut se demander avec lequel de ses contemporains il est possible de lui trouver des points communs. Avec Francis Gruber, grand peintre disparu trop tôt qui représentait les mêmes figures décharnées, issues des privations d’une France minée par des années de guerre ? Avec Alberto Giacometti, dont les contours brouillés et nombreux cherchaient à capter le réel ?
Ces comparaisons restent cependant superficielles, comme le souligne le jugement de Giacometti : « Le dessin de Buffet a une certaine précision. Il ressemble à ce que je fais, dans l’utilisation exclusive de la ligne et du gris. Mais il s’arrête exactement à l’endroit où je commence. Et au lieu de peindre la réalité, il la schématise ».
Les artistes et les critiques ont pu en effet être troublés devant les apparentes certitudes du jeune peintre et l’invention d’un style qui devait s’épanouir dans une stéréotypie assumée. Beaucoup finirent par l’accuser de systématisme et de trucage, plutôt que d’en mesurer la modernité. Or celle-ci n’a pas échappé à la perspicacité d’un Dutilleul, lorsqu’il accroche en bonne place la Nativité de Bernard Buffet sur les murs de son appartement. Malgré sa dureté et son dépouillement, cru jusqu’au malaise, et qui choqua en son temps, cette toile côtoie sans complexe les peintures de Matisse, de Braque et de Picasso. On peut aussi rappeler l’indignation de Maurice Girardin décrite par le marchand Emmanuel David3 lorsque Bernard Buffet échoua au prix de la Jeune Peinture en 1948 avec Le Buveur, dont la physionomie est si proche d’un autoportrait de Picasso de 1907. Ce tableau constitua l’un des premiers achats de l’amateur, fasciné comme beaucoup par le regard désespérément absent qui s’inscrivait dans la tradition des buveurs d’absinthe de Degas à Picasso – dont une version avait été achetée par Im Obersteg à Zurich en 1925.
De toute évidence, ces collectionneurs ont su déceler les liens que la peinture de Bernard Buffet entretient avec la stylisation et les yeux vides des modèles de Modigliani, la simplification des formes et la palette du cubisme, et même la synthèse de l’abstraction. C’est précisément cet ancrage profond dans l’histoire de l’art occidental qui attira le regard du banquier japonais Kiichiro Okano, subjugué par l’ambiance de ces toiles et leur construction orthogonale inconnue de l’art japonais, au point de collectionner passionnément Bernard Buffet et de lui ouvrir un musée monographique près du mont Fuji en 1973.
1 Roger Dutilleul (1872-1956), Maurice Girardin (1884-1951), Charles Im Obersteg (1883-1969). La collection de Roger Dutilleul fut poursuivie par son neveu Jean Masurel (1908-1991) et celle de Charles Im Obersteg par son fils Jürg (1914-1983).
2 Dans les trois cas, les collectionneurs contribuèrent à l’enrichissement considérable de musées par des donations : Girardin au Musée d’art moderne de la Ville de Paris, Dutilleul/Masurel au Musée d’art moderne de Villeneuve d’Ascq (aujourd’hui le LaM), et Im Obersteg au Kunstmuseum de Bâle.
3 Emmanuel David, Le Métier de marchand de tableaux, Éditions France-Empire, Paris, 1978, p. 214.
Marchand et collectionneur de Bernard Buffet dès 1948, Maurice Garnier rassembla passionnément pendant plus de soixante ans, les oeuvres majeures de ce peintre pour lequel il rêvait d’ouvrir en France un musée monographique. Dans ce but, il conserva ou racheta environ trois cents peintures à l’huile qui appartiennent aujourd’hui au Fonds de Dotation Bernard Buffet créé en 2009 avec son épouse Ida.
De qualité muséale et réunis en ensembles cohérents correspondant à toutes les périodes de création de l’artiste, les portraits, les natures mortes et les paysages s’ajoutent aux grands formats de chacune de ses expositions annuelles. Ces oeuvres monumentales ont notamment pour thèmes, Horreur de la guerre, Le Cirque, Jeanne d’Arc, Les Corridas, Sumo et Kabuki, Vingt mille lieues sous les mers, Les Clowns musiciens ou La Mort, présentée en 2000, après le décès du peintre.
Pour Maurice Garnier, cette collection devait témoigner de l’inspiration et de la créativité sans cesse renouvelées de Bernard Buffet auquel il vouait une profonde admiration et auquel il consacra entièrement sa vie.
Céline Lévy Directrice du Fonds de Dotation Bernard Buffet
Bernard Buffet
Le buveur, 1948
Huile sur toile, 100 x 65 cm
Photo DR
Bernard Buffet devant un autoportrait, 1952. Photo DR.
O’BRADY Gertrude (MAC BRADY Gertrude, dit) (1903-1978)
Portrait de Roger Dutilleul, 1946
Crayon graphite sur papier, 50 x 32,3 cm
N° inv. : 979.4.207
Don de Geneviève et Jean Masurel – LaM, Lille Métropole musée d’art moderne, d’art contemporain et d’art brut, Villeneuve d’Ascq
Photo Philip Bernard
Bernard Buffet et Bernard Lorjou ex-aequo au Prix de la critique
1948 devant le tableau de Bernard Buffet. Photo DR.
Bernard Buffet et Maurice Garnier chez Constant rue de Seine en
1949. Photo DR.
* – Les oeuvres illustrées sur les pages de droite du catalogue sont les oeuvres exposées.
NATURE MORTE AU POISSON, 1948
Signé et daté en haut à gauche
Huile sur toile
54 x 65 cm.
Collection particulière
La carafe et les poissons, 1941
Huile sur toile, 33,5 x 55,5 cm.
N °inv. : D.991.3.1
Dépôt du Musée national d’art moderne / Centre de création contemporaine en 1991
LaM, Lille Métropole musée d’art moderne, d’art contemporain et d’art brut, Villeneuve d’Ascq
Photo DR
La cafetière , 1948
Signé et daté en haut à gauche
Huile sur toile
61 x 38 cm.
Collection particulière
Le bock, 1909
Huile sur toile, 81 x 65,5 cm.
N° inv. : 979.4.111
Donation de Geneviève et Jean Masurel en 1979
LaM, Lille Métropole musée d’art moderne, d’art contemporain et d’art brut, Villeneuve d’Ascq
Photo Studio Lourmel
NATURE MORTE AU PORTE-BOUTEILLE, 1048
Signé et daté en haut à gauche
Huile et mine de plomb sur toile
46 x 65 cm.
Collection particulière
Nature morte à la table, 1910
Huile sur toile, 92 x 71 cm.
N° inv. : AMVP 469
Legs du Docteur Maurice Girardin
Musée d’art moderne de la Ville de Paris, Paris
Photo Musée d’art moderne / Roger-Viollet
HARENG SAURS ET MOULIN A CAFE, 1948
Signé et daté en haut à droite
Huile sur toile
46 x 65 cm.
Ancienne collection Roger Dutilleul
Collection particulière
« Ne vous y fiez pas. Une nature morte de Buffet n’est morte que d’un oeil et prête à mordre. Les ustensiles des Arts ménagers deviennent, entre ses mains de mince bourreau pâle vêtu de rouge, des instruments de torture aptes à faire parler, coûte que coûte, le silence, prendrait-il l’apparence d’une nappe, d’une chaise, d’un peigne, d’une raie ou d’une tête de veau. À nul autre je ne saurais mieux appliquer cette devise : Ne mélangez pas les torchons et les serviettes, car je suis torchon. »
Jean Cocteau, in Poésie critique, Éditions Gallimard, Paris, 1959
Le Figaro, 25 octobre 1979 :
« Dutilleul : un amateur de génie »
À l’arrière-plan, on distingue Hareng Saurs et moulin à café de Bernard Buffet.
NATURE MORTE AU PAIN ET AU FROMAGE, 1949
Signé et daté en haut à droite
Huile sur toile
65 x 92 cm.
Collection particulière
Huile sur carton, 48,5 x 60 cm.
N° inv. : AMVP 460
Musée d’art moderne de la Ville de Paris, Paris
Photo Musée d’art moderne / Roger-Viollet
Bernard Buffet assis devant son tableau dans son atelier de la maison du Quesnoy, le 15 août 1947.
Photo DR.
Christian Dazy
Si nous considérons, la peinture comme l’art de diviser harmonieusement une surface, en lignes et masses, Bernard Buffet est passé maître dans cette discipline.
Les oeuvres des années 1950 en sont une preuve significative. L’architecture repose essentiellement sur la ligne pure et incisive.
Elle met en relation les objets entre eux, mais aussi avec l’espace de l’oeuvre dans sa globalité.
Verticales, horizontales, obliques se combinent, se rapprochent, cheminant parallèlement, se croisent dans un dialogue silencieux.
La ligne dans sa plus simple expression mais extrêmement efficace dans son expressivité.
ARS LINEANDI. Cette discipline du Moyen-Âge est l’une des plus anciennes formes d’art de l’humanité que l’on retrouve dans les arts lombards et irlandais notamment. Connaître la ligne, ses possibilités d’expression et les mettre au service d’un art figuratif ou pas.
Pensons aux dalles en pierres gravées du Néolithique ou de l’âge de bronze.
Bernard Buffet renoue avec cette tradition, revient aux sources de tout art, quelque soit l’époque, le lieu ou la forme artistique.
Cela donne naissance à des masses d’une extrême simplicité, formes simples, archétypales, (quadrilatères, triangles, etc..) qui ne sont pas sans rappeler la puissance expressive des arts premiers.
Autre outil d’expression dont se sert admirablement, Bernard Buffet : la science du vide. Si il est admis que la musique naît du silence alors la grande peinture naît des vides.
Vides silencieux mettant en valeur les objets et les relations qui existent entre eux.
Vides qui ne sont pas du rien, mais vibrants, habités soit par un graphisme ou par des matières.
On retrouve ici le grand art oriental fondé sur le Yin et le Yang, le plein et le vide, l’analogie des contraires.
Grand principe de la philosophie du Tao qui se manifeste dans l’art pictural.
Pour Bernard Buffet, la façon d’appréhender le monde au travers de sa peinture révèle un désir farouche de capter l’essence des objets.
Minimaliste avant l’heure, mais dans le but d’éliminer toute anecdote, facilité, fioritures décoratives empêchent le sujet de se révéler pleinement. À tel point qu’il peut passer de l’objet dépouillé, de l’inutile au signe pictural. La fenêtre de 1950 est un exemple évident. Nous sommes là en présence d’un phénomène de métamorphose consistant à passer de l’objet réaliste aux symboles graphiques.
C’est ainsi que Bernard Buffet trouve une écriture puissante, évocatrice, très personnelle.
Parfois la transposition ne va pas aussi loin mais reste suffisante pour induire un rapport figuratif abstrait, très présent.
La rascasse et Les lapins écorchés de 1949 en sont l’illustration.
Il suffit de retourner la toile dans un sens ou un autre pour qu’il n’y ait plus de lapin, plus de rascasse.
Simplement des rapports de masse, des pleins de vide, de clair, de sombre.
Synthèse du figuratif et de l’abstrait souvent considéré comme un clivage.
D’une manière intentionnelle ou pas, Bernard Buffet réalise la synthèse entre différents types de traditions picturales et d’archétypes formels. Plongeant profondément ses racines dans le passé il en extrait la sève qui nourrit un art autant moderne qu’intemporel et universel.
INONDATION, 1946
Signé en haut à droite
Huile sur toile
91 x 130 cm.
Collection particulière
Bords de Seine, c. 1911
Huile sur toile, 73 x 92 cm.
N° inv. : AMVP 463
Legs du Docteur Maurice Girardin
Musée d’art moderne de la Ville de Paris, Paris
Photo Musée d’art moderne / Roger-Viollet
LE MOULIN A VENT, 1951
Signé et daté en haut à droite
Huile sur toile
114 x 146 cm.
Collection particulière
« Ce qu’aimait Dutilleul, c’était une certaine spontanéité dans la production des signes picturaux, parce qu’il voyait dans ce jaillissement la preuve de la sincérité du peintre, et d’un art non étouffé par la raison ou le métier. »
Francis Berthier, in Recherche sur la collection Dutilleul, 1977,
thèse, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, Paris
PAYSAGE DE BANLIEUE, 1951
Signé et daté en haut à droite
Huile sur toile
114 x 146 cm.
Collection particulière
Rue de Saint-Louis-en-l’Isle, 1918
Huile sur toile, 73 x 53,5 cm.
N° inv. : 979.4.121
Donation de Geneviève et Jean Masurel en 1979
LaM, Lille Métropole musée d’art moderne, d’art contemporain et d’art brut, Villeneuve d’Ascq
Photo Studio Lourmel
PHARE ET SEMAPHORE, 1951
Signé et daté en haut à droite
Huile sur toile
114 x 146 cm.
Collection particulière
« Buffet représente tout ce qu’il voit autour de lui : le monde entier est pris pour sujet, son art est un miroir du monde, traduit dans un langage imagier émotionnel, mais aussi radical. »
Otto Letze, in Absolut Buffet, 2002
PLAGE, 1956
Signé et daté en bas à gauche
Huile sur toile
97 x 195 cm.
Collection particulière
« Bernard Buffet a du génie. Le mot est excessif, direz-vous. Dufy, avant de mourir il y a trois ans, a dit, parlant de notre artiste : “ C’est le plus grand peintre français vivant. ” (…) Disons, si le mot de génie vous scandalise, que Bernard Buffet a le don, le don unique, celui qui est le signe du destin. (…) Le monde qu’il porte en lui, il nous l’impose et nous force à le voir. »
Georges Hourdin, L’enfer et le ciel de Bernard Buffet, Éditions du Cerf, Paris, 1958
HOMME NU ALLONGE SUR LA PLAGE, 1956
Signé et daté en haut
Huile sur toile
114 x 195 cm.
Collection particulière
Homme nu assis, 1908-09
Huile sur toile, 96 x 76 cm.
N° inv. : 979.4.109
Donation de Geneviève et Jean Masurel en 1979
LaM, Lille Métropole musée d’art moderne, d’art contemporain et d’art brut, Villeneuve d’Ascq
Photo Philip Bernard
NU COUCHE, 1959
Signé et daté au centre
Huile sur toile
114 x 146 cm.
Collection particulière
L’origine du monde, 1866
Huile sur toile, 46 x 55 cm.
Musée d’Orsay, Paris
NU, 1953
Signé et daté en haut à droite
Huile sur toile
116 x 89 cm.
Collection particulière
Nu assis à la chemise, 1917
Huile sur toile, 92 x 67,5 cm.
N° inv. : 979.4.105
Donation de Geneviève et Jean Masurel en 1979
LaM, Lille Métropole musée d’art moderne, d’art contemporain et d’art brut, Villeneuve d’Ascq
Photo Philip Bernard
VANITE, 1954
Signé et daté en haut à droite
Huile sur toile
81 x 54 cm.
Collection particulière
« Servi par une prodigieuse puissance de travail, il devint, à travers de multiples thèmes, le peintre tragique de la condition humaine. »
Maurice Druon de l’Académie française, Préface du catalogue de l’exposition Tableaux pour un musée 1970-1976, Galerie Maurice Garnier, 2006
L’ESCALIER, 1956
Signé et daté en haut
Huile sur toile
100 x 81 cm.
Collection particulière
« La détresse de ses compositions monochromes d’un vide traduit tout ce qui manque au coeur ; l’élongation des verticales et des horizontales, la nervosité des lignes de force maléfiques griffant légèrement une pâte mince, tout annonce un peintre apte à résumer, comme Kafka, Kierkegaard, Sartre, l’insécurité ou les privations parmi lesquelles il a grandi ».
Claude Roger-Marx et Jean Giono, in Cent tableaux de 1944 à 1958 par Bernard Buffet, Galerie Charpentier, 1958, Éditeur Raymond Nacenta n. p.(3)
Raie , 1958
Signé et daté en bas à droite
Huile sur toile
130 x 97 cm.
Collection particulière
« Ce qui frappe à première vue, c’est l’attrait et l’intérêt similaires que l’intéressé portait à la peinture classique et à la peinture contemporaine. »
Francis Berthier, in Recherche sur la collection Dutilleul, 1977, thèse, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, Paris
La raie, c. 1725-1726
Huile sur toile, 114 x 146 cm.
Musée du Louvre, Paris
BIOGRAPHIE
1928
Naissance de Bernard Buffet le 10 juillet à Paris.
1943
Admission à l’École nationale supérieure des beaux-arts de Paris où il restera
jusqu’en 1946.
1946
Au Salon des Moins de Trente Ans, Galerie des Beaux-Arts à Paris, Bernard Buffet expose pour la première fois.
1947
Participation au Salon des Indépendants. En décembre, première exposition à la Librairie des Impressions d’Art organisée par Guy Weelen et Michel Brient et présentée par Pierre Descargues. Le Musée national d’Art moderne de Paris (aujourd’hui au Centre Pompidou) achète pour l’État le tableau Nature morte au poulet.
1948
En avril, Emmanuel David de la Galerie Drouant-David propose à Bernard Buffet d’entrer dans sa galerie avec un contrat d’exclusivité. Dès l’automne, le contrat d’exclusivité est partagé avec Maurice Garnier. En juin, Bernard Buffet obtient le Prix de la Critique, Galerie Saint-Placide ex æquo avec Bernard Lorjou.
1949
En février, première exposition à la Galerie Drouant-David. Mariage avec Agnès Nanquette, une camarade de l’École des Beaux-Arts, dont il divorcera l’année suivante.
1950
Début d’une relation intime avec Pierre Bergé, qui durera jusqu’en 1958.
1951
Jean Giono met à la disposition de Bernard Buffet un cabanon à Manosque, il y
reste jusqu’à son installation dans une ancienne bergerie à Nanse où il peint en 1954, les trois tableaux de grandes dimensions « Horreur de la Guerre ».
1952
Bernard Buffet illustre Les chants de Maldoror du Comte de Lautréamont avec des gravures à la pointe sèche.
1953
Bernard Buffet expose à la Galerie Drouant-David des paysages peints à l’huile et chez Maurice Garnier à la Galerie Visconti des dessins sur le même thème. Il illustre Recherche de la Pureté de Jean Giono de gravures à la pointe sèche. Louis Aragon publie à cette occasion dans les Lettres Françaises un articule intitulé « Le paysage a 4 siècles et Bernard Buffet 24 ans ».
1954
Bernard Buffet illustre La Passion du Christ par vingt et une gravures à la pointe sèche.
1955
Bernard Buffet obtient la première place dans l’enquête organisée par la revue Connaissance des Arts désignant les dix meilleurs peintres de l’après-guerre. Il peint les maquettes des décors et des costumes pour La Chambre, argument de Georges Simenon, musique de Georges Auric pour les Ballets de Paris Roland Petit. Il acquiert la propriété de Château l’Arc près d’Aix-en-Provence, avec vue sur la montagne Sainte-Victoire. Elle sera sa résidence principale jusqu’en 1964.
1957
Bernard Buffet illustre de gravures à la pointe sèche La Voix Humaine de Jean Cocteau.
1958
Première rétrospective de cent tableaux à la Galerie Charpentier à Paris.
Il peint les maquettes des décors et des costumes pour Le Rendez-vous manqué, argument de Françoise Sagan, musique de Michel Magne, chorégraphie de John Taras et Don Lurio, mise en scène par Roger Vadim. Le 12 décembre, Bernard Buffet épouse à Ramatuelle, Annabel Schwob, chanteuse, actrice et écrivain.
1959
Il peint les maquettes des décors et des costumes de Patron, argument de Marcel Aymé, musique de Guy Béart, pour les ballets Roland Petit.
1961
Bernard Buffet peint un ensemble de tableaux représentant la vie du Christdestiné à décorer la chapelle de Château l’Arc. Dix ans plus tard, à la demande de Monseigneur Pasquale Macchi, secrétaire du Pape Paul VI, Bernard Buffet offrira ces tableaux au Musée du Vatican.
1962
Il peint les maquettes des décors et des costumes de Carmen, musique de Georges Bizet, mise en scène de Louis Ducreux pour l’Opéra de Marseille.
Il réalise un livre illustré de seize gravures à la pointe sèche Saint-Cast, souvenirs d’enfance, poème de Baudelaire. Il est nommé Chevalier des Arts et des Lettres.
Naissance de sa fille Virginie.
1963
Expositions au Musée d’Art Moderne à Tokyo et au Musée d’Art Moderne à Kyoto. Naissance de sa fille Danielle.
1964
Bernard Buffet illustre de dessins à l’encre de Chine Toxique de Françoise Sagan.
1966
Bernard Buffet illustre de lithographies en couleur Herbier de Louise de Vilmorin.
1967
Pour l’Opéra de Paris, il peint les maquettes du rideau de scène, des décors et des
costumes pour Le grand cirque, musique d’Aram Khatchatourian, chorégraphie de Serge Lifar, et des maquettes du décor et des costumes pour Istar, musique de Vincent d’Indy, chorégraphie de Serge Lifar.
1968
Bernard Buffet réalise l’ouvrage Mon Cirque illustré de quarante-quatre lithographies en couleurs.
1969
Exposition au Musée d’Unterlinden à Colmar.
1970
Bernard Buffet réalise l’ouvrage Jeux de Dames composé de vingt lithographies, poèmes de Verlaine, Rimbaud et Baudelaire.
1971
En mai, Bernard Buffet est nommé Chevalier de la Légion d’Honneur, distinction qui lui est remise par Maurice Druon. Naissance de son fils Nicolas.
1973
Le 25 novembre, inauguration du Musée Bernard Buffet à Surugadaira au Japon fondé par Kiichiro Okano.
1974
Bernard Buffet est élu à l’Académie des Beaux-Arts le 13 mars.
1976
Bernard Buffet illustre par onze gravures à la pointe sèche L’Enfer de Dante.
1978
À la demande de l’Administration des Postes, Bernard Buffet réalise une maquette pour un timbre de 3 francs, l’Institut et le Pont des Arts. À cette occasion, le Musée Postal à Paris présente une exposition de son oeuvre.
1991
Expositions au Musée Pouchkine, Moscou, au Musée de l’Ermitage de Saint-Pétersbourg et au Musée Hyundai à Séoul. À la demande de l’Administration des Terres australes et antarctiques françaises, Bernard Buffet réalise une maquette pour un timbre de vingt-cinq francs soixante-dix.
1993
Exposition au Musée Gustave Courbet à Ornans.
Bernard Buffet est promu au grade d’Officier de la Légion d’Honneur.
1994
Exposition à la Documenta-Halle à Kassel.
1995
Exposition itinérante au Japon (Tokyo, Kyoto, Nara, Akita, Hakodate et Obihiro).
1996
Exposition au Musée des Beaux-Arts à Kaoshiung, Taïwan.
1999
Exposition à la Galerie Nationale à Erevan, Arménie. Bernard Buffet affecté par la maladie de Parkinson, ne pouvant plus peindre, met fin à ses jours le 4 octobre.
2000
En février, sa dernière exposition thématique ouvre à la Galerie Maurice Garnier sous le titre La Mort.
1946-1947 Salon des Moins de Trente Ans, Galerie des Beaux-Arts
1947 Galerie des impressions d’Art, Paris
1947-1955, 1967, 1969, 1971,1978-1988 Salon des Tuileries, Galerie Charpentier
1947, 1948 Salon des Indépendants
1948 Salon d’Automne
1948 « Prix de la Jeune Peinture », Galerie Drouant-David
1948 « Prix de la Critique », Galerie Saint-Placide
1948 Salon de Mai
1949 « Second Manifeste de l’Homme témoin », Galerie Claude
1950-1952 Salon des Jeunes Peintres, Galerie des Beaux-Arts
1952 Biennale de Venise, pavillon français
1956 Biennale de Venise, pavillon français (salle particulière)
1962-1971 Salon des « Peintres témoins de leur temps », Musée Galliera
EXPOSITIONS ANNUELLES
Galerie Drouant-David
1949-1951 Exposition personnelle
1952 La Passion du Christ
1953 Paysages
1954 Nus
1955 Horreur de la Guerre
1956 Le Cirque
Galerie Visconti
1952 La Passion du Christ (dessins)
1953 Paysages (dessins)
1954 Bestiaire (dessins)
1955 Horreur de la Guerre (aquarelles)
1956 Le Cirque (aquarelles)
Galerie David et Garnier
1957 Paysages de Paris
1958 Jeanne d’Arc
1959 New York
1960 Les Oiseaux
1961 Portraits d’Annabel
1962 La Chapelle de Château d’Arc
1963 Paysages de Venise
1964 Le Muséum de Bernard Buffet
1965 Les Écorchés puis Vingt tableaux peints à Saint-Cast
1966 Femmes déshabillées
1967 La Corrida
Galerie Maurice Garnier
1968 Les Plages
1969 Églises de France puis Paysage de Bretagne
1970 Châteaux de la Loire
1971 Les Folles
1972 Danièle et Virginie
1973 Les Bateaux
1974, 1975 Paysages
1976 Paysages de neige
1977 L’Enfer de Dante puis Natures mortes
1978 La Révolution française puis Aquarelles de Saint-Tropez
1979 Fleurs puis Aquarelles de Saint-Tropez
1980 Nus
1981 Le Japon puis Les Oiseaux d’Hokkaido
1982 Autoportraits
1983 Paysages
1984 Petits formats
1985 L’Automobile
1986 Les Pays-Bas
1987 Vues de Venise (aquarelles)
1988 Sumo et Kabuki puis Natures mortes
1989 Don Quichotte
1990 Vingt mille lieues sous les mers puis La Bretagne
1991 Vues de New York puis Souvenirs d’Italie
1992 Les Clowns Musiciens puis Saint-Pétersbourg
1993 L’Empire ou les Plaisirs de la Guerre puis Promenade Provençale
1994 L’Odyssée
1995 Les Sept Péchés Capitaux
1996 Pékin puis Gravures à la pointe-sèche
1997 Régates
1998 La Maison
1999 Mes Singes
2000 La Mort
2001 Tableaux pour un musée (thème repris chaque année jusqu’en 2009)
PRINCIPALES RÉTROSPECTIVES ET EXPOSITIONS PERSONNELLES
1955 Bernard Buffet, Galerie Lucien Blanc, Aix-en-Provence
1955 Paintings by Bernard Buffet, Los Angeles County Museum
1957 Niveau Gallery, New York
1958 Cent tableaux de 1944 à 1958 par Bernard Buffet, Galerie Charpentier, Paris
1958 Les Voyages fantastiques de Cyrano de Bergerac, Musée Jacquemart-André, Paris
1958 Bernard Buffet, Institut français, Berlin
1963 Bernard Buffet, Musée national d’art moderne de Tokyo, Musée national d’art moderne de Kyoto
1968 Bernard Buffet, Radierungen, Städtische Kunsthalle, Mannheim
1969 Bernard Buffet, Musée Unterlinden, Colmar
1978 Sapporo Hokkaido Museum of Modern Art
1978 Bernard Buffet, Musée postal, Paris
1980 Rétrospective itinérante de l’oeuvre lithographié au Japon
1991 Musée Pouchkine, Moscou ; musée de l’Ermitage, Saint-Pétersbourg
1993 Bonjour Monsieur Buffet !, Musée Gustave Courbet, Ornans
1993 Vingt mille lieues sous les mers, Musée départemental de l’Oise, Beauvais
1993 Bernard Buffet, Château de Chenonceau
1994 Bernard Buffet retrospektive, Documenta-Halle, Kassel
1995 Bernard Buffet, Odakyu Museum of Art, Tokyo ; Takashimaya Museum of art, Kyoto ; Nara Sogo Museum, Nara; Akita Senshu City Museum, Akita; Hakodate Public Museum, Hokkaido; Obihiro, Public Museum, Hokkaido
1997 Jeanne d’Arc, Palais de Justice, Rouen
1998 Bernard Buffet, Palais Bénédictine, Fécamp
2000 Musée Sogo, Yokohama
2003 Bernard Buffet, Musée Paul Valéry, Sète
2006 Bernard Buffet: een omstreden œuvre, Gemeentemuseum, La Haye
2007 Bernard Buffet et la Bretagne, Musée département breton, Quimper
2008 Bernard Buffet Maler, MMK Museum für Moderne Kunst, Francfort-sur-le-Main
2009 Bernard Buffet, Centre de la Vieille Charité, Marseille
2009 Bernard Buffet et Annabel, Sogo Museum of Art in Yokohama
2010 Bernard Buffet, Meguro Museum, Tokyo
2014 Post 1958: une symphonie de couleur en plus, Musée du Touquet-Paris-Plage, Le Touquet
2014 Salle d’exposition du Gouvernement, Andorre
2014-2015 Bernard Buffet, Heydar Aliyev Center, Bakou
2016-2017 Bernard Buffet Rétrospective, Musée d’art moderne de la Ville de Paris, Paris
2016-2017 Bernard Buffet, Intimement, Musée de Montmartre, Paris
EXPOSITIONS COLLECTIVES
1952 Recent Trends in Realist Painting, Institute of Contemporary Arts, Londres
1953 Bernard Buffet, Bernard Lorjou, Louis Valtat, Claude Venard, Musée de L’Athénée, Genève
1957 Bernard Buffet, Kunstverein, Munich
1959 Musée d’Art moderne de Kanagawa
1960 Musée de L’Athénée, Genève
1970 Petit Palais de Genève
1973 Musée du Vatican, Rome
1973 Grand Palais, Paris
1985 L’Automobile, Musée de l’Automobile, Mulhouse
1995 Galerie nationale d’art moderne, Tbilissi
1995 Centre Jean Giono, Manosque
1999 Galerie nationale d’Arménie, Erevan
2002-2003 Paris, capitale des arts, 1900-1968, Royal Academy of Art, Londres ; Guggenheim Museum, Bilbao
2002-2003 Cher peintre…, Lieber Maler…, Dear Painter…, Centre Pompidou, Paris ; Kunsthalle, Vienne ; Schirn Kunsthalle, Francfort-sur-le-Main
2003 Coollustre, collection Lambert, Avignon
2004 Moi – Autoportraits du XX e siècle, Musée du Luxembourg, Paris
2005 Une histoire de paravents, La Piscine, Roubaix
2006 La Force de l’Art, Grand Palais, Paris
2007 Année 1950, l’alternative figurative, Musée d’Art Roger-Quillot, Clermont-Ferrand
2007 Pont-Aven, du paysage à l’oeuvre, Musée de Pont-Aven
2009 Galerie Rodolphe Janssen, FIAC, Paris
2010 C’est la vie – Vanités du XV e au XX e siècle, Musée Maillol, Paris
2010 Aragon et l’Art moderne, Musée de la Poste, Paris
2010 De Nolde à Buffet, Forum Würth, Arlesheim
2011 Oceanomania, Nouveau Musée national de Monaco, Villa Paloma
2012-2013 L’Art en guerre, France 1938-1947, Musée d’art moderne de la Ville de Paris ; Guggenheim Museum, Bilbao
BIBLIOGRAPHIE SÉLECTIVE
Pierre DESCARGUES, Bernard Buffet, Éditions P.L.F., Paris, 1949
Pierre DESCARGUES, Bernard Buffet, Éditions P.L.F., Paris, 1952
Pierre BERGÉ, Bernard Buffet, Horreur de la guerre, Éditions Parenthèses, Paris, 1955
Jean GIONO, Bernard Buffet, Éditions Fernand Hazan, Paris, 1956
Pierre BERGÉ, Bernard Buffet, Éditions l’Artisan, Paris, 1958
Pierre BERGÉ, Bernard Buffet, Éditions Pierre Cailler, Genève, 1958
Georges SIMENON et Jean BOURET, Bernard Buffet, Éditions Les Cahiers de la Peinture, Paris, 1958
Georges HOURDIN, Bernard Buffet, Éditions du Cerf, Paris, 1958
Pierre BERGÉ, Bernard Buffet, Art et Style, Paris, 1958
Maurice DRUON, Bernard Buffet, Éditions Hachette, Paris, 1964
Pierre CABANNE, Bernard Buffet par, Éditions Fernand Hazan, Paris, 1966
Charles SORLIER, Bernard Buffet lithographe I, Éditions Michèle Trinckvel, Paris, 1979
Maurice RHEIMS, Bernard Buffet graveur, Éditions d’Art de Francony, Éditions Maurice Garnier, 1983
Uwe BRAUER, Bernard Buffet, biographie, Éditions Pro Art, Genève, 1983
Annabel BUFFET, D’amour et d’eau fraîche, Éditions Sylvie Messinger, Paris, 1986
Yann LE PICHON, Bernard Buffet, (deux premiers volumes de la monographie), Éditions Galerie Maurice Garner, Paris, 1986
Georges DURAND, La divine comédie de Bernard Buffet, Éditions Desclée de Brouwer, Paris, 1986
Charles SORLIER, Bernard Buffet lithographe II, Paris, Éditions André Sauret, Monte-Carlo, 1987
Alin Alexis AVILA, Bernard Buffet, Éditions Casterman, Paris, 1989
Stéphane LAURENT, Bernard Buffet, le peintre crucifié, biographie, Éditions Michalon, Paris, 2000
Annabel BUFFET, Post Scriptum, Éditions Plon, Paris, 2001
Annabel BUFFET et Jean-Claude LAMY, Bernard Buffet, secrets d’atelier textes, photographies
de Luc Fournol et Benjamin Auger, Éditions Flammarion, Paris, 2004
Lydia HARAMBOURG, Bernard Buffet et la Bretagne, Éditions Palantines, Quimper, 2006
Henry PÉRIER, Bernard Buffet et la Provence, Éditions Palantines, Quimper, 2007
Brigitte CAMUS, Buffet ou la psychanalyse en signature, Éditions de l’Épure, 2007
Yann LE PICHON, Bernard Buffet (troisième volume de la monographie), Éditions Galerie Maurice Garnier, Paris, 2007
Jean-Claude LAMY, Bernard Buffet, le Samouraï, Biographie, Éditions Albin Michel, Paris, 2008
John SILLEVIS, Bernard Buffet, monographie, Éditions Palantines, Quimper, 2008
Lydia HARAMBOURG, Bernard Buffet, Fonds de dotation Bernard Buffet, Éditions Palantines, Quimper, 2013
Picasso, Léger, Masson. Daniel-Henry Kahnweiler et ses peintres, LAM, SNEL Graphics, Vottel (Herstal), Belgique, 2013
Nicholas FOULKES, Bernard Buffet: The Invention of the Modern Mega-artist, Preface publishing, Londres, 2016
Bernard Buffet, catalogue de l’exposition au Musée d’art moderne de la Ville de Paris du 14 octobre 2016 au 26 février 2017, Éditions Paris Musées, Paris, 2016 Bernard Buffet, Intimement, catalogue de l’exposition au Musée de Montmartre-Jardins Renoir du 18 octobre 2016 au 5 mars 2017, Somogy éditions d’art, Paris, 2016
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© ADAGP, Paris, 2017 pour les oeuvres de Bernard Buffet,
Georges Braque (p. 18), André Derain (p. 22), Maurice de Vlaminck
(pp. 26, 30), Maurice Utrillo (p. 34)