La gravure est inhérente à l’œuvre de Sam Francis qui produit des estampes dès les années 1950. L’artiste se passionne pour la gravure et en étudie les techniques tout au long de sa carrière.

LA DÉCOUVERTE DE LA GRAVURE

Sam Francis expérimente pour la première fois la lithographie dans les années 1950 grâce à Tatyana Grosman. Cette dernière fonde le studio Universal Limited Art Edition (ULAE) en 1957 et publie les oeuvres d’artistes comme Sam Francis mais aussi de Larry Rivers, Robert Rauschenberg, Robert Motherwell, Helen Frankenthaler, Jasper Johns, Barnett Newman, Claes Oldenburg, Cy Twombly… La plupart des oeuvres produites ont été acquises par le Metropolitan Museum of Art de New York et l’Art Institute de Chicago.
En Suisse, le galeriste Eberhard W. Kornfeld encourage Sam Francis à produire des lithographies. Une première série de 60 oeuvres est ainsi créée à Zürich en 1960 avec l’imprimeur Emil Matthieu.

LA PEINTURE & LA GRAVURE

La gravure et la peinture vont s’influencer mutuellement dans l’œuvre de Sam Francis. La lithographie est créée à l’horizontal et cela encourage Sam Francis à peindre sur des toiles posées au sol. L’artiste souhaite retrouver dans la gravure le même éclat des couleurs que dans la peinture. Dan Cytron un de ses assistant, témoigne : « Sam pouvait se payer n’importe quel pigment et voulait des couleurs rares et obscures, comme le cadmium, ou des couleurs cobalt, qui n’étaient pas accessibles au grand public ». Sam Francis n’hésitait pas à transgresser les frontières entre les mediums, utilisant des produits destinés à la photographie ou à l’impression sur ses toiles. Sa capacité d’innovation fait de lui un artiste inclassable.

La peinture et la gravure présentent également des différences fondamentales : la gravure est un travail en plusieurs étapes qui demande de visualiser – à l’avance et à l’envers – le résultat final de superpositions de planches colorées. C’est un véritable puzzle qui apporte de nouveaux défis à l’artiste : « Je crois que ce qui est plaisant c’est la compression du temps et de l’espace dans cet unique moment où l’on appuie sur le bouton [de la presse] et qu’il revient. C’est la compression physique, mentale, spirituelle. Tout est comprimé en ce moment. C’est très différent que de faire une peinture. » Il ajoute : « C’est sain, cela me force à penser les choses, à la différence de la peinture, qui est plus directe. »

LE BLANC EN GRAVURE

À la fin des années 1960, Sam Francis laisse de plus en plus de place au blanc dans ses œuvres. Le vide est encerclé de touches colorées. Le blanc n’est pas celui d’une encre ou d’une peinture, mais celui du papier, dans une recherche de pureté lumineuse absolue : « Le papier a sa propre beauté… il se suffit à lui-même. Vous additionnez donc un état absolu à un autre état absolu… Le papier a son propre message. » explique l’artiste.

THE LITHO SHOP

En 1970, Sam Francis ouvre The Litho Shop à Santa Monica : un atelier de gravure qui devient le lieu idéal pour l’expérimentation dans une liberté totale de création.
Sam Francis travaille avec des imprimeurs expérimentés comme Jacob Samuel – qui restera au Litho Shop pendant 18 ans – et George Page. Ensemble, ils travaillent différentes techniques, la lithographie mais également la sérigraphie, l’eau forte, l’aquatinte…

GEMINI STUDIO

Sam Francis travaille également avec le Gemini studio qui ouvre en 1965 à Los Angeles. C’est là qu’il s’initie à la sérigraphie. L’un de ses derniers projets avec l’atelier Gemini est une œuvre de 36 couleurs différentes, des plus intenses aux plus pastel. Cette grande subtilité vient de la superposition de nombreux écrans de soie. Cette œuvre montre que Sam Francis aimait repousser les limites de chaque médium pour atteindre le plus haut niveau de raffinement possible.
Le Gemini studio publie également les œuvres de Ellsworth Kelly, James Rosenquist, Richard Serra…

2RC EDIZIONI D’ARTE

Sam Francis produit des eaux fortes à partir de 1973. Elles sont d’abord éditées par 2RC Edizioni d’Arte à Rome. Certaines sont en noir et blanc, d’autres en couleurs. À partir de 1981, Sam Francis travaille l’eau-forte avec David Kelso au Gemini studio. Il installe également une presse pour eau-forte au Litho Shop.

Sam FRANCIS – SF 79 – 1964
Lithographie en couleurs sur papier – 39,5 x 57,5 cm
Numéroté «4/7» en bas au centre
Signé «Sam Francis» en bas au centre
Imprimées par Joseph Press, Los Angeles, CA
Éditées par Pasadena Art Museum, CA
Galerie Diane de Polignac, Paris

Sam FRANCIS – SF 188 – 1973
Lithographie en couleurs sur papier – 69 x 104 cm.
Signé «Sam Francis» en bas à gauche
Inscription «artist proof» en bas à droite
Édité par The Litho Shop Inc, Santa Monica (CA)
Galerie Diane de Polignac, Paris

En gravure comme en peinture, Sam Francis est le grand interprète de la couleur. Artiste virtuose, il s’approprie de nombreuses techniques et en repousse sans cesse les limites. Pour Sam Francis, les estampes sont des œuvres à part entière et constituent un pan fondamental de son expression créative.

Texte : Mathilde Gubanski
© Astrid de Monteverde / Galerie Diane de Polignac