Après une formation d’architecte, le peintre Olivier Debré choisit définitivement l’abstraction. L’œuvre de 1948 présentée ici est caractéristique de la peinture parisienne d’Après-guerre.
L’ artiste peintre Olivier Debré tire sa veine artistique du côté maternel de sa famille : son grand-père est peintre et son oncle est architecte. Très jeune, Olivier Debré se met à dessiner, à peindre et à sculpter, puis entre à l’École nationale supérieure des beaux-arts de Paris dans la section architecture. L’artiste fréquente l’atelier de Le Corbusier. Olivier Debré raconte : « Enfant, je mêlais l’architecture, la peinture, la sculpture. Pour moi, cela correspondait à la même chose, c’était une manière d’être en opposition à la médecine, au droit, aux mathématiques. Les Beaux- Arts formaient un tout. Aussi bien l’architecture que la peinture. »
Le peintre Olivier Debré abandonne l’architecture pour se consacrer à la peinture au début des années 1940. Il confie : « Pendant cette période troublée de la guerre, j’étais là, dans cette Touraine où j’étais toujours allé quand j’étais enfant, et je suis redescendu dans le champ et j’ai peint, simplement, comme ça. » Il ajoute : « (…) En peinture, j’avais un besoin d’expression directe et de communication physique avec la nature ; peut-être justement, dans cette époque troublée, le besoin d’échapper à cette société au fond si horrible. » La peinture devient pour lui son moyen d’expression, son langage, comme « transcription de [s] on émotion ». Les paysages sont immédiatement une source d’inspiration pour l’œuvre picturale d’Olivier Debré. Son abstraction tirée de l’observation de la nature fera de lui une des figures majeures du Paysagisme abstrait.
En 1941, Olivier Debré rencontre Pablo Picasso et se rend de nombreuses fois dans son atelier à Paris. L’œuvre de son aîné l’inspire et l’incite à exprimer son émotion sans utiliser la représentation. Il développe une abstraction qui lui est propre, fondée sur le signe, qui est pour lui « l’incarnation de la pensée ».
En 1944, l’artiste peintre Olivier Debré peint sa première toile abstraite. Il rencontre à cette époque d’autres peintres clés de l’Abstraction lyrique : Gérard Schneider, Jean-Michel Atlan, Pierre Soulages et Hans Hartung. Olivier Debré se tourne vers l’abstraction pour ses capacités expressives et crée ainsi son propre langage pictural : « Ou bien le langage est purement conventionnel, on sait avant ce que tel signe veut dire, et c’est au fond l’écriture ou alors, si l’on veut que le signe soit compréhensible, il faut qu’il repasse par l’émotion, par la sensation matérielle et, de nouveau, il n’est plus un langage pur. À ce moment-là, je me suis tout de suite introduit dans les signes » explique l’artiste.
Les peintres Olivier Debré (1920-1999), André Lanskoy (1902-1976) et Nicolas de Staël (1913-1955) se tournent vers l’abstraction presque au même moment, entre 1942 et 1944. André Lanskoy, peintre de la couleur, rencontre son homologue russe Nicolas de Staël en 1945. L’année suivante, il rencontre Olivier Debré et l’encourage à utiliser une palette plus colorée. Les recherches de ces trois peintres abstraits présentent des affinités : des fonds unis sur lesquels se détachent des lignes sinueuses et des nuées d’aplats de couleurs.
L’œuvre de 1948 présentée à la galerie est emblématique de cette période. Sa palette sourde est caractéristique de la peinture d’Après-guerre. On retrouve également les lignes souples qui structurent l’abstraction et rappelle la formation d’architecte de l’artiste Olivier Debré. Les couleurs placées en multitudes de petits aplats donnent du rythme à la composition. Olivier Debré pose ici avec audace des jaunes, des bleus, des roses et des parmes qui annoncent déjà la palette éclatante de ce grand artiste du Paysagisme abstrait.
Astrid de Monteverde et Mathilde Gubanski
© Astrid de Monteverde, Mathilde Gubanski / Galerie Diane de Polignac